Trois ans sans sortir un album studio, le nouvel-orléanais Curren$y nous a couvert de mixtapes (au hasard le délectable The Drive-in Theater), EPs (dont le Live In Concert avec Wiz Khalifa) et autres projets de label (les deux albums de la Jet Life) pour nous faire patienter jusqu’à ce troisième volume de Pilot Talk dont on fantasmait tant. Les deux premiers volets étaient sortis en 2010 sur la structure DD172 créée par Damon Dash et étaient produits par Ski Beatz. C’était aussi les deux premiers albums physiques de Curren$y après de nombreuses sorties dématérialisées qui lui ont permis d’élargir sa fanbase.
Mais ce sont bien Pilot Talk « un » et II qui ont lancé Spitta Andretti dans la stratosphère en développant un univers insoupçonné à base de bolides, de weed et d’instrus laid-back à souhait, autant d’éléments qui ont posé les solides bases de sa musique chill-rap (pourrait-on dire) qu’il a ensuite dérivé à volonté pour en arriver en 2012 à sa première sortie en major The Stoned Immaculate. S’attaquer à la poursuite d’une saga culte (le Pilot Talk I s’échange contre 43 euros neuf sur le site de la Fnac) était un pari risqué, il s’est avère aujourd’hui que Pilot Talk est une trilogie culte.
Pour clôturer cette trilogie, Curren$y collabore à nouveau logiquement avec Ski-Beatz, mais les Cool & Dre ont été appelés en renfort pour se partager le travail. Est-ce que les producteurs de Miami ont dénaturé le projet ? Absolument pas. C’est d’ailleurs après des écoutes répétées que j’ai appris qu’ils faisaient partie du comité de pilotage, signe que le choix des instrus et la direction artistique de Curren$y prévaut sur le reste. On remarquera après coup leurs prods utilisant des samples soulfuls comme sur « Opening Crédits« , le morceau d’ouverture (c’est écrit dessus). Ski-Beatz reprend alternativement les commandes de Pilot Talk III avec des instrus très organiques pour notre plus grand confort auditif. Il y a cette trompette, harpe et violons sur « Long as the Lord Say » pour le pilotage automatique, des guitares et une voix féminine pour chiller sur le très agréable « Get Down« , idem pour « Search Party« , ou ces samples de cuivres très classe de « Briefcase » accompagné de violons qui nous font planer au-dessus des grattes-ciels. On retrouve là l’essence et les éléments qui ont fait le succès des deux premiers volets, cet art de vivre de Curren$y volant en main, un joint fraîchement roulé dans la bouche. Cumulé à l’effet des beaux jours qui reviennent, il n’y a rien de tel que ce disque. Ah, toujours ces ad-libs où il chantonne et parlotte…
Ce Pilot Talk III ne serait pas digne de porter ce nom s’il n’y avait pas de « Audio Dope« , le cinquième morceau du nom figure en bonne place avec une prod de Ski-Beatz évidemment. Curren$y nous transporte dans la continuité des précédents volets parus cinq ans plus tôt, avec parfois une voix plus enrouée que d’habitude, en apportant de subtiles évolutions, dont les samples tunés par les Cool & Dre à qui l’ont doit l’immense « Life I Chose » et « 560 SL » en duo avec Wiz Khalifa, luxueux comme une Mercedes. Curren$y fait aussi occurence de la Ferrari FF (modèle 2+2 quatre roues motrices), mais ce sont surtout les voitures qui figuraient en poster dans nos chambres avec lesquelles on s’imagine rouler, Ferrari Testarossa, Lamborghini Countach… Que des modèles mythiques. Il n’y a que « Froze » qui brise un peu la cohérence avec cet instru d’Harry Fraud, refrain saturé et la présence de Riff Raff. Pas une fausse note mais un changement radical de vibe qui jette un léger froid (c’est le cas de le dire). Il faut remettre le chauffage en marche. Parmi les autres guests, les anciens Bad Boys Ruff Ryders Jadakiss sur « Pot Jar« , gros morceau, et son frère Styles P sur « Alert« . Mais aucun membre de la Jet Life, seul vrai bémol.
Je n’irai pas jusqu’à classer les volets entre eux, il faut considérer cette trilogie dans son ensemble. C’est l’occasion idéale de se la refaire entièrement. Trilogie, à moins bien entendu qu’un VI se profile dans le futur… Il n’y a pas grand chose à rajouter non plus sur la performance de Curren$y, là aussi il faut tenir compte de l’ensemble de son travail entre textes et instrumentaux. C’est un petit monde. Pilot Talk III est disponible en packages USB contre un montant compris entre 100 et 2500$ (!!), contenant une peinture de la pochette.
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